La 14e édition du festival Ciné Droit Libre sous le sceau de la justice
Les festivaliers affluent individuellement ou par petits groupes devant les stands érigés dans l’enceinte de l’espace culturel Gambidi. Il est environ 16H00 GMT et sur des toiles, de jeunes dessinateurs et caricaturistes, font la parodie de la justice, comme pour obéir au thème du festival : « Justice, levez-vous ».
Devant le portail de l’espace Gambidi, principal site d’attraction de cette 14e édition du festival consacré aux droits humains et à la liberté d’expression, le parking grouille déjà de motos et de voitures. Venus des différents recoins de Ouagadougou, jeunes, femmes, enfants et personnes du troisième âge, étudiants, réalisateurs, personnalités publiques, affluent dans la cour en attendant le début de la soirée d’ouverture.
Les locaux de l’espace culturel Gambidi, sont aménagés spécifiquement aux couleurs de Ciné Droit Libre : de loin, deux grandes enseignes illuminent l’intérieur de la cour. On y perçoit clairement un juge vêtu de sa toge, assis sur une pile de dossiers au point que ses pieds ne touchent plus le sol. Ces deux enseignes marquent l’entrée des stands où sont exposés des livres, des objets artisanaux, des gadgets.
Le stand des « prisonniers » et des artisans réfugiés maliens se distinguent par leurs originalités. Les détenus, conviés à exposer leurs créations, proposent aux festivaliers des produits divers fabriqués par eux-mêmes : savons, sacs, tableaux, bijoux entre autres. Les réfugiés touaregs, quant à eux, sont venus présentés un savoir-faire ancestral : l’artisanat. Ils vendent des parures de beauté, des objets de décoration d’intérieur (poufs, nappes en cuir, boîtes à bijoux…).
A leurs côtés, d’autres organisations partenaires du festival animent des stands. « Je trouve le thème bien inspiré. C’est très sensé surtout le contexte (actuel) du Burkina Faso. Il faut que cette justice se rappelle de son rôle historique. Qu’elle ne s’asseye pas sur les dossiers », estime Loé Konaté, un exposant venu présenté des t-shirts et autres gadgets à l’effigie de leaders panafricanistes africains, notamment Thomas Sankara, chef de la Révolution burkinabè de 1984-1987.
La représentation de l’ONG Oxfam au Burkina Faso, accueille dans son stand les visiteurs avec le message « le pouvoir citoyen contre la pauvreté », affiché sur une banderole.
Au centre, sur une longue toile vierge, des personnalités inscrivent leurs noms pour immortaliser leur passage à la cérémonie d’ouverture de Ciné Droit Libre. On peut, entre autres lire les noms de René Bagoro, ministre burkinabè de la Justice, Metsi Makhetha, représentante résidente des Nations Unies au Burkina Faso.
Vers 18H00, les festivaliers se dirigent dans la salle Sony Labou Tansi, où une scène avec un décor digne d’un tribunal, attendent les artistes et « Libre », le film d’ouverture du festival. Environ trente minutes plus tard, l’humoriste ivoirien Adama Dahico, a revêtu sa robe de procureur d’un soir, dans sa peau de maître de cérémonie.
Après une brillante prestation a capela du jeune slameur Slim 1er, qui plaide pour les migrants, place aux discours. « Certains pays confisquent les papiers des migrants pour prolonger leur détention de façon arbitraire et inhumaine. Les films que diffuse Ciné Droit Libre permettent de mettre à jour certaines exactions sur les droits humains », renchérit Petrus Barry, directrice Afrique de l’Ouest de Amnesty international dans son allocution ».
Selon elle, le festival « contribue à la promotion des droits humains ». A sa suite, l’ambassadrice du Royaume de Danemark clame qu’au Burkina Faso, après le soulèvement populaire d’octobre 2014, « plus rien ne sera comme avant. Mais Ciné Drout Libre doit rester comme avant ».
Le festival s’est vu refusé plusieurs salles de cinéma gérées par l’État sous l’ex-président Blaise Compaoré (1987-2014), notamment le « Ciné Burkina ». Cette année, en raison de la fermeture de l’Institut Français, les organisateurs ont porté leur choix sur l’Espace culturel Gambidi.
Devant un public enthousiaste, curieux et euphorique de la salle Sony Labou Tansi, Smockey, l’un des porte-parole du Balai Citoyen a rendu un vibrant hommage aux divers militants des droits de l’homme détenus ou assassinés en Afrique, notamment Luc Nkulula de la Lucha (RDC), Foly Satchivi de la ligue togolaise de défense des droits des étudiants et Moussa Tchangari (Niger).
Justice, levez-vous ! Ce thème a été motivé « par l’existence de dossiers emblématiques en justice dans plusieurs pays comme au Burkina Faso, au Mali, au Sénégal… Sans complaisance, la justice sera à la barre et elle sera condamné si elle est déclarée coupable par ceux qu’elle a l’habitude de juger », justifie le coordinateur du festival Abdoulaye Diallo, à la tribune.
« Vive les droits humains ! », « Vive le cinéma engagé ! », « Vive la liberté d’expression ! », lance monsieur Diallo, en déclarant officiellement l’ouverture du festival. Après les discours, s’installe le premier film du festival, « Libre » du réalisateur français Michel Tusca sur les conditions des conditions d’existence des migrants africains en France.
A la suite du documentaire, place aux débats entre le public, le co-parrain de l’évènement Claudy Siar et madame Barry de Amnesty International. La première journée de la 14e édition de Ciné Droit Libre s’achève par un spectacle de musique live avec le groupe de Sylvain Dando Paré, qui entretiendra les festivaliers de l’Espace culturel Gambidi chaque soir après les projections cinématographiques.
Hassimi ZOURE