Burkina : plus de cinq millions d’enfants privés de l’état civil

Plus de cinq millions d’enfants ne sont toujours pas enregistrés devant l’état civil au Burkina Faso, rapporte les résultats d’une enquête de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR), présenté jeudi 23 août 2018 à Ouagadougou.
« En 2016, le taux d’enregistrement des naissances a été estimé à 77,8% (…). La situation demeure préoccupante car plus de 5 millions d’enfants ne sont pas enregistrés au Burkina Faso. Cette situation est accentuée par la mauvaise gestion des données due à l’absence d’information des registres sur l’état civil », peut-on lire dans le document.
Ces personnes ne disposant pas de pièces d’état civil, sont menacées par l’apatridie. Elles sont sans nationalité et ne pourront pas avoir accès à l’école, à un emploi décent ou n’auront pas la possibilité d’effectuer un mariage civil, si leur situation d’apatride reste inchangée. « Priver des individus de nationalité, c’est engendrer la souffrance, l’exclusion et la marginalisation », déplore Ioli Kimyaci, représentante de l’UNHCR au Burkina Faso.
Dans la région du Sahel burkinabè en proie à l’insécurité et au manque d’infrastructures administratives, le taux d’enregistrement des naissances demeure le plus bas du pays, soit 40%. En l’absence de documents d’état civil et d’identité, les individus se trouvent dans l’incapacité de prouver leur appartenance à un pays.
Du coup, ils sont confrontés au « refus d’accès aux services de base, le risque permanent d’arrestation, de détention, de criminalisation, de traite des êtres humains », mentionne le rapport d’enquêtes, qui révèle également des forts risques d’apatridie « dans les régions frontalières » : le Nord, l’Ouest et l’Est.
Les conflits, les migrations, les difficultés de gestion des
frontières, la marginalisation, les défaillances administratives, les
abandons d’enfants, l’analphabétisme entre autres, sont des facteurs qui
favorisent l’apatridie.
Les raisons évoquées par les enquêtés ne disposant pas de documents
d’état civil sont « la méconnaissance des procédures (36,4%), le manque
d’intérêt lié au document (23,2%), la distance par rapport aux services
d’état civil (18,6%) et le coût (6,7%) ».
En vue d’éradiquer l’apatridie à l’horizon 2024, le gouvernement burkinabè a adopté en septembre 2017 un plan d’actions, a expliqué le ministre de la Justice Réné Bagoro, lors de la cérémonie de restitution des résultats de l’enquête de l’UNHCR, et en présence d’une trentaine de autorités administratives des régions les plus frappées.
A la faveur de la crise sécuritaire qui secoue le Mali depuis janvier 2012, le Burkina Faso accueille des dizaines de milliers de réfugiés, soit 24.658 au 31 mai 2018. Ils sont également menacés par l’apatridie, selon l’UNHCR.
En 2018, l’Etat burkinabè a accordé 125 naturalisations. En 2017, 146.952 certificats de nationalités ont été délivrés.
Au Burkina Faso, pays sahélien d’Afrique de l’Ouest, la législation « n’est pas encore conforme aux engagements nationaux de l’Etat », recommande le rapport d’enquête qui invite aussi les autorités à « moderniser l’état civil ».
L’atelier de présentation du document se tient les 23 et 24 août 2018 à Ouagadougou.
Hassimi Zouré