Des espions à la solde du RSP dans le filet des manifestants
Nous avons fait le tour de quelques quartiers de Ouagadougou en ce jour ensoleillé du 21 septembre 2015. Le constat est le même : l’intensification de la résistance. Une chose est sure, la démobilisation n’est pas pour demain à moins que la plateforme revendicative de la population soit satisfaite. Ambiance dans les rues de Ouaga.
Ouagadougou s’apprête à des heures chaudes, c’est le moins qu’on puisse dire. La lutte se poursuit de manière la plus rude. La résistance s’intensifie de partout. Les rues sont en flamme. Personne ne passe sur les voies principales au point que les six mètres (routes annexes) se transforment à des voies principales. Que se passe-t-il ? « Les nouvelles ne sont pas bonnes », me répond un jeune homme partagé entre empêcher les usagers de la route de circuler et dresser les barricades. De quelles nouvelles parlez-vous ? « Mon ami si tu es journaliste alors cherche toi car si le RSP arrive ici on ne parlera plus de toi. L’heure n’est pas aux questions… », confidence de mon interlocuteur. Quelques usagers négocient le passage mais ils n’obtiendront pas gain de cause : « la loi c’est la loi ; elle s’applique à tous », pouvait-on entendre. « Pas de travail, pas de circulation, rentrez chez vous » lance un manifestant furieux et prêt à frapper une femme qui veut forcer le passage. La situation était visiblement tendue, il faut donc se mettre à l’abri. Nous avons mis le cap sur la grande voix de Wemtenga.
De la pédiatrie Charles de Gaulle à wemtenga c’est presque la même stratégie. Mais là c’est une autre scène qui nous a été donnée à voir. Un attroupement de jeunes qui se disputent attire notre attention. Qu’est-ce qui se passe ? « Nous avons attrapé des espions », me répond un jeune homme sans même jeter un coup de regard sur moi. De quel espion s’agit-il ? « Du RSP », poursuit-il, indifférent à ma présence. Avez-vous des preuves que c’est des espions ? Il ne me répond plus et à un autre de prendre la relève en me situant à ces termes : « quand nous étions en train de dresser les barricades, ces jeunes (supposés espions) passaient et nous leur avons dit qu’il est impossible de passer. Une bagarre a failli s’engager. Ils ont rebroussé chemin mais nous ne les avons pas perdus de vu. Ils étaient arrêtés de l’autre côté de la voix. Pendant ce temps ils étaient permanemment en communication. Quelques minutes après leur communication nous voyons arriver le RSP. Et ces jeunes se sont mis avec le RSP pour ôter nos barricades. Nous avons conclu donc qu’ils sont bel et bien des espions à la solde du RSP ». « Il est de toute évidence qu’ils travaillent pour le RSP », poursuit son explication. Et à son tour de me poser une question : pourquoi le RSP ne tire-t-il pas sur eux ? « Ils sont connus par le RSP, c’est ça la réponse ». Quel est leur sort ? « Cette fois-ci on les laisse. De toutes les façons nous les connaissons tous », poursuit mon interlocuteur. Le frère d’un des supposés espions a failli laisser sa peau en défendant son frère. Il a eu la vie sauve en se réfugiant dans une boutique.
Chemin faisant, nous apercevons la police nationale qui dégage la voie. Pourquoi dégagent-ils la voie ? On me répondra que le président Kafando doit rentrer chez lui.
Au retour, devant l’hôpital Pédiatrie, la situation y est insoutenable avec l’appel à la mobilisation « non-stop ». Une traque titrée : Mobilisation Générale est distribuée à tout passant et on pouvait lire : « les propositions du RSP ne sont pas bonnes, contraire à l’esprit patriotique et démocratique. Levons nous tous comme un seul homme pour barrer les routes de l’impunité. Barrons toutes les routes le 22 septembre 2015 pour marquer notre désaccord. Non à l’impunité, non aux délinquants, non aux tueries et matraquages du peuple. La patrie ou la mort nous vaincrons. » Le ton est donc donné. Qui est l’initiateur de cette traque ? « Ne cherche pas à savoir. Pourvu que ça appelle à la mobilisation », m’a lâché à la figure le distributeur de ladite traque. Vous l’aurez compris, l’arrêt de la résistance n’est pas pour demain.
Masbé NDENGAR